lundi 25 août 2025
Pour une économie au service du Vivant
Economie Circulaire & RessourcesNature & Biodiversité

Parce que les ressources de la planète sont gratuites et que le bon fonctionnement des services écosystémiques est considéré à tort comme un commun inaliénable, le système économique entretient l’illusion d’un monde infini. Car utiliser le système Terre pour faire de l’argent, sans assumer les conséquences socio-économiques des altérations du capital naturel, ne peut plus être considéré comme la seule politique à suivre.
L’économie doit devenir un levier de régénération plutôt qu’un facteur de destruction. C’est l’idée force soutenue par Marine Calmet, Présidente de Wild Legal et Fabrice Bonnifet, Président du C3D et de GenAct, qui nous invite à repenser les fondements de notre modèle de société à travers le prisme du Vivant.
Pour maintenir les conditions d’habitabilité de la planète, le recours aux principes inspirants des droits de la Nature représente un outil majeur de transformation écologique. Autrement dit, nous devons considérer que nos liens d'interdépendance au Vivant doivent s'inscrire au cœur de toutes nos décisions d’aménagement des territoires à des fins économiques. De leur côté, les entreprises doivent réinventer leurs modèles d’affaires afin que la création de valeur économique contribue à régénérer les milieux naturels.
Cette rencontre entre le monde du droit et celui de l'entreprise pour imaginer une économie alignée avec les limites planétaires et les besoins du Vivant ne pourra s’imposer que si tous les États adoptent progressivement cette approche. En absence d’une gouvernance mondiale, notre sort dépend des sommets internationaux (climat, biodiversité, océan, plastique…) dont l’objet est de rechercher des consensus improbables, dans un contexte dans lequel les intérêts financiers particuliers priment toujours l’intérêt général.
La raison des échecs successifs des négociations est simple : l’argent demeure le seul arbitre. Au nom de la préservation de la rente de quelques privilégiés (selon le Global Wealth Report 1.6% des plus riches possèdent 48.1% des richesses mondiales !) disposant des moyens pour désinformer, corrompre et contourner des régulations dérisoires, le temps passe, et la situation sociale et environnementale mondiale ne cesse de se dégrader.
Depuis des décennies, la même tragédie se joue en quatre actes :
- Établissement d’un consensus scientifique mettant en lumière l’évolution des catastrophes sanitaires et écologiques liées aux activités humaines.
- Contre-offensive systématique, orchestrée par la « fabrique du mensonge » via des médias complaisants, de la part de ceux qui refusent tout changement, semant le doute dans l’esprit de citoyens désorientés.
- Travail de sape des lobbyistes, experts en intimidation des négociateurs et des ONG, utilisant toujours les mêmes arguments : perte de compétitivité, absence d’alternatives, menace de chômage de masse…. Tout en promettant l’émergence de technologies qui ne résoudront rien et en proposant des solutions inefficaces ciblant les symptômes plutôt que les causes (exemple : le recyclage du plastique) et bien entendu en glorifiant les bienfaits « au nom du progrès » de ce qu’il faudrait pourtant réduire ou supprimer — tout en dénigrant les conclusions de l’acte 1.
- Pirouette sémantique dans les communiqués finaux, mettant en avant des avancées dérisoires, et annonce d’un nouveau sommet « décisif » dans un an, qui, une fois de plus, n’aboutira à rien.
Il est grand temps de changer de méthode pour sortir de cette spirale mortifère, injuste et scandaleuse. La solution, pourtant, est sous nos yeux. Il ne manque plus que des leaders capables de la mettre en œuvre. Elle aussi se décline en quatre actes :
- Reconnaissance des faits scientifiques comme point de départ incontournable des politiques publiques.
- Abandon de l’économie productiviste linéaire, génératrice de déchets et de pollutions, au profit d’une économie perma-circulaire à visée régénérative.
- Organisation de conventions citoyennes d’envergure, aux niveaux international, national et local, pour définir collectivement ce dont nous avons réellement besoin pour vivre dignement.
- Mise en œuvre d’un système économique fondé sur la post-croissance au service du bien-être du vivant humain et non humain, ainsi que sur la prévention des risques dans le but de réduire les déficits publics des pays, dont la majorité des dépenses provient de coûts de réparation facilement évitables.
Retrouvez Fabrice Bonnifet, président du C3D sur la table ronde "Pour une économie au service du Vivant" et l'atelier "Quel modèle d’entreprise pour concilier performance économique, justice sociale et transition écologique ?"